Contrat ferroviaire bulgare : Alstom remporte finalement l'appel d'offres de 448 millions d'euros pour 35 EMU après un processus tumultueux

Découvrez comment Alstom a décroché le contrat de 448 millions d'euros pour 35 rames automotrices en Bulgarie, après des rebondissements juridiques et le retrait surprise de Stadler. Un projet crucial pour la modernisation ferroviaire bulgare.

Contrat ferroviaire bulgare : Alstom remporte finalement l'appel d'offres de 448 millions d'euros pour 35 EMU après un processus tumultueux

Après un processus d'appel d'offres particulièrement mouvementé, Alstom vient finalement de remporter un contrat majeur de 448 millions d'euros pour la fourniture de 35 rames automotrices électriques (EMU) aux chemins de fer bulgares. L'accord comprend également la maintenance de ces trains pendant une période de 15 ans. Cette annonce marque l'aboutissement d'une procédure d'attribution complexe qui a connu de nombreux rebondissements judiciaires et le retrait inattendu de Stadler, initialement pressenti pour remporter ce marché.

Une annonce officielle après un long parcours juridique

L'information a été rendue publique le 7 mars lors d'une session parlementaire par Grozdan Karadjov, vice-premier ministre et ministre des transports bulgare. Cette décision intervient après une bataille juridique qui s'est conclue par un jugement favorable de la Cour administrative suprême du pays.

Karadjov a précisé qu'une période de recours de 10 jours auprès de la Commission de protection de la concurrence (CPC) reste ouverte, laissant planer une incertitude sur la finalisation définitive du contrat. Cette précaution souligne la nature sensible de ce processus d'attribution qui a déjà connu plusieurs contestations.

Les multiples rebondissements d'un appel d'offres chaotique

Le parcours de ce contrat ferroviaire illustre parfaitement les défis que peuvent rencontrer les grands projets d'infrastructure en Bulgarie :

  • En mai 2024, plusieurs entreprises européennes de premier plan, dont Alstom, Stadler, Pesa et le groupe Škoda, avaient soumis leurs offres pour ce marché stratégique
  • En juin 2024, Stadler avait été initialement désigné comme soumissionnaire préférentiel
  • Quelques semaines plus tard, le fabricant suisse s'est retiré de la compétition, citant les "hauts niveaux de risque dans le contrat" comme motif principal
  • Face à cette situation, le ministère des Transports avait tenté d'engager une procédure de négociation directe pour sélectionner un nouveau fournisseur

Ce revirement de situation a déclenché une série de contestations juridiques qui ont considérablement ralenti le processus d'attribution.

L'intervention décisive de la justice bulgare

Le consortium BUL20EMU, composé d'Alstom et de la société locale RVP Invest, a joué un rôle déterminant en contestant les décisions prises après le retrait de Stadler. Cette démarche s'est avérée payante puisqu'en décembre 2024, la Cour administrative suprême de Bulgarie a statué en leur faveur.

Dans son jugement, la Cour a:

  • Invalidé la décision de la Commission de protection de la concurrence qui avait rejeté la plainte du consortium
  • Qualifié cette décision de "mal raisonnée" et ordonné une réévaluation complète des offres
  • Annulé la décision du ministre des transports qui souhaitait recourir à une négociation directe pour choisir le fournisseur

Ce n'était d'ailleurs pas la première intervention de la justice dans ce dossier. Dès août 2024, une décision antérieure de la cour avait déjà bloqué la progression du contrat, estimant qu'il y avait une "justification insuffisante pour une approbation accélérée" de la procédure.

Des contraintes financières et temporelles critiques

L'attribution de ce contrat à Alstom intervient dans un contexte où les délais deviennent particulièrement préoccupants. Le constructeur français a confirmé sa capacité à respecter le délai de livraison de 28 mois stipulé dans le contrat, un point essentiel pour les autorités bulgares.

Un financement européen conditionné aux délais

Le financement de cette acquisition s'inscrit dans le cadre du Plan de reprise et de résilience de la Bulgarie, qui a alloué une enveloppe totale de 559 millions d'euros pour le renouvellement de la flotte ferroviaire. Cependant, cette aide financière européenne est soumise à une condition stricte : les livraisons doivent être effectuées avant août 2026.

Cette contrainte temporelle représente un défi majeur pour Alstom, car:

  • Le contrat vient seulement d'être attribué en mars 2025
  • Le délai de production et de livraison de 28 mois dépasse théoriquement l'échéance fixée par l'UE
  • Les livraisons qui interviendraient après cette date limite devraient être financées par des fonds nationaux bulgares

Face à cette situation, des solutions alternatives sont envisagées. Selon le quotidien local Capital, l'une des options consisterait à adapter des trains existants ou "near-complete trains" pour respecter le délai imposé par l'Union Européenne et ainsi sécuriser le financement.

Des risques persistants pour la réalisation du projet

Malgré cette avancée significative, plusieurs obstacles potentiels demeurent sur le chemin de ce projet ferroviaire :

  • Le risque de recours juridiques par d'autres soumissionnaires mécontents pendant la période de contestation de 10 jours
  • La possibilité de perdre une partie substantielle du financement européen en cas de retard dans les livraisons
  • Les défis logistiques et techniques liés à la production et à la livraison d'un nombre important de trains dans un délai serré

Ces incertitudes continuent de planer sur ce contrat crucial pour la modernisation du réseau ferroviaire bulgare.

Un contexte plus large de renouvellement du matériel roulant

L'attribution de ce contrat à Alstom s'inscrit dans une dynamique plus globale de modernisation du parc ferroviaire bulgare, qui a connu d'autres développements significatifs récemment :

  • Stadler s'est également retiré d'un autre contrat bulgare concernant la fourniture de sept trains à deux niveaux
  • Ce second contrat a finalement été attribué au constructeur polonais Pesa après une négociation directe
  • En septembre 2024, le groupe Škoda a confirmé avoir obtenu un marché pour la fourniture de 20 EMU à quatre voitures, avec une option pour cinq trains supplémentaires

Un programme d'investissement ambitieux

Ces différentes acquisitions font partie d'un vaste programme d'investissement ferroviaire. La Bulgarie prévoit en effet d'investir au total 1,5 milliard d'euros dans le renouvellement de ses flottes de trains dans le cadre d'un programme pluriannuel qui s'étend de 2021 à 2027.

Ce programme représente un effort sans précédent pour moderniser l'infrastructure ferroviaire bulgare, qui souffre depuis longtemps d'un sous-investissement chronique. L'objectif est d'améliorer significativement la qualité et la fiabilité des services ferroviaires dans tout le pays, tout en réduisant l'impact environnemental des transports.

Les implications pour l'avenir du transport ferroviaire bulgare

L'attribution de ce contrat à Alstom constitue une étape décisive pour les chemins de fer bulgares. Les 35 rames automotrices électriques modernes permettront de :

  • Remplacer une partie du matériel roulant vieillissant actuellement en service
  • Améliorer la qualité et le confort des voyages pour les passagers
  • Réduire les coûts d'exploitation et la consommation énergétique
  • Accroître la fiabilité et la ponctualité des services ferroviaires

Pour Alstom, ce contrat représente également une victoire significative qui renforce sa présence en Europe de l'Est. Le constructeur français, qui a déjà fourni du matériel roulant à plusieurs pays de la région, consolide ainsi sa position sur ce marché en pleine expansion.

Conclusion : Un pas important vers la modernisation ferroviaire bulgare

Malgré les nombreux rebondissements et les incertitudes qui demeurent, l'attribution de ce contrat à Alstom marque une avancée significative dans le processus de modernisation du transport ferroviaire bulgare. Le renouvellement de la flotte de trains électriques devrait contribuer à améliorer considérablement la qualité des services offerts aux usagers et à renforcer l'attractivité du rail comme mode de transport.

Toutefois, les défis liés aux délais de livraison et aux risques de recours juridiques rappellent la complexité inhérente aux grands projets d'infrastructure dans la région. Les prochaines semaines seront déterminantes pour confirmer définitivement cette attribution et lancer concrètement la production des nouvelles rames.