Corridor Méditerranéen espagnol : 273 millions d'euros pour accélérer le plus grand chantier ferroviaire d'Europe

L'Espagne investit 273 millions d'euros dans trois nouveaux contrats pour le Corridor Méditerranéen, adaptant son réseau ferroviaire aux standards européens. Découvrez les avancées de ce projet stratégique.

Corridor Méditerranéen espagnol : 273 millions d'euros pour accélérer le plus grand chantier ferroviaire d'Europe

Corridor Méditerranéen espagnol : trois nouveaux contrats accélèrent le chantier ferroviaire stratégique

Le Ministère espagnol des Transports et de la Mobilité Durable vient d'attribuer trois contrats majeurs pour faire progresser le projet du Corridor Méditerranéen, une infrastructure ferroviaire stratégique visant à établir une ligne à écartement européen (1435 mm) reliant la frontière française à Algeciras. Ces investissements, totalisant près de 273 millions d'euros, marquent une avancée significative dans ce projet d'envergure qui transforme le réseau ferroviaire espagnol. Tour d'horizon des sections concernées et des enjeux techniques de ce chantier d'envergure européenne.

La section Torre Pacheco - Cartagena : un tronçon clé de 128,4 millions d'euros

Le premier contrat, d'une valeur de 128,4 millions d'euros, concerne les travaux de génie civil sur la section Torre Pacheco - Cartagena longue de 8,9 kilomètres. Cette portion s'inscrit dans le cadre plus large de la ligne à grande vitesse de 45 km reliant Murcia à Cartagena.

Des défis techniques considérables dans une région agricole

Les travaux devront relever plusieurs défis techniques majeurs. L'un des plus importants consiste à minimiser l'impact sur les terres agricoles et les systèmes d'irrigation, essentiels à l'économie locale. La région étant connue pour son agriculture intensive, les ingénieurs devront concevoir des solutions permettant de préserver ces infrastructures vitales.

Par ailleurs, la météorologie de cette zone méditerranéenne impose la mise en place d'un système de drainage particulièrement performant. Capable de faire face aux précipitations intenses et autres phénomènes météorologiques extrêmes qui caractérisent la région, ce système sera crucial pour garantir la pérennité et la sécurité de l'infrastructure ferroviaire.

Une conception qui intègre le transport de marchandises

La nouvelle ligne sera construite parallèlement à la ligne existante à écartement ibérique (1668 mm) entre Chinchilla et Cartagena. Le projet prévoit également l'aménagement d'une boucle de dépassement de 750 mètres pour les trains de marchandises à La Palma-Pozo Estrecho, infrastructure qui sera implantée sur le site d'un ancien quai de gare aujourd'hui désaffecté.

Point d'avancement du projet Murcia - Cartagena

Les travaux avancent simultanément sur plusieurs fronts. La section de 17,7 km entre Riquelme et Torre Pacheco est déjà en cours de réalisation. Parallèlement, les études de conception progressent pour la section El Reguerón - Riquelme ainsi que pour la jonction avec la ligne à grande vitesse Monforte del Cid - Murcia au nord d'El Reguerón. Quant à la dernière portion menant à Cartagena, les études préliminaires ont débuté fin 2023.

La conversion à double écartement de La Encina - Alicante : un investissement de 129,4 millions d'euros

Le deuxième contrat, d'un montant de 129,4 millions d'euros, concerne les travaux de voie et de caténaire sur la section La Encina - Alicante longue de 75 kilomètres. L'objectif est d'adapter cette portion à l'écartement européen de 1435 mm tout en conservant la possibilité de faire circuler des trains à écartement ibérique.

Modernisation des infrastructures pour le fret ferroviaire

Ce projet comprend l'installation de nouvelles boucles de dépassement de 750 mètres pour les trains de marchandises à Caudete, Sax et Monforte del Cid. Ces aménagements permettront d'optimiser le trafic en facilitant le croisement des convois et en fluidifiant la circulation sur cette section très fréquentée.

Des travaux techniques complexes pour une interopérabilité maximale

Les travaux incluent le remplacement des voies existantes par des traverses spéciales capables d'accueillir trois rails, permettant ainsi la circulation de trains aux deux écartements. Des aiguillages à double écartement seront également installés aux points stratégiques du parcours.

Le projet prévoit aussi l'amélioration du gabarit de chargement, une modification essentielle pour permettre le développement futur du transport combiné rail-route, également appelé "piggyback". Cette technique, qui consiste à charger des semi-remorques routières sur des wagons ferroviaires, représente une solution d'avenir pour réduire l'empreinte carbone du transport de marchandises.

Une électrification tournée vers l'avenir

Les modifications apportées au système d'électrification aérienne sont conçues avec une vision à long terme. Si l'infrastructure fonctionne actuellement sous une tension de 3 kV en courant continu (CC), les travaux anticipent déjà une future conversion à 25 kV en courant alternatif (CA), standard européen offrant de meilleures performances énergétiques.

Achèvement de la conversion La Encina - Xàtiva - Valencia : la touche finale d'un projet de 245 millions d'euros

Le troisième contrat, d'un montant de 15 millions d'euros, vient compléter un projet global de 245 millions d'euros visant à convertir la ligne de 122 km entre La Encina, Xàtiva et Valencia à l'écartement standard européen pour les trains à grande vitesse.

Amélioration des infrastructures existantes

Ces travaux comprennent des améliorations significatives du gabarit de chargement ainsi que d'importants travaux dans les tunnels de Font de la Figuera et Cabezo de Barracas, situés entre L'Énova et Manuel. Ces interventions sont indispensables pour permettre la circulation des trains à grande vitesse dans des conditions optimales de sécurité.

Modernisation complète des systèmes électriques et de signalisation

Le projet prévoit le remplacement de l'actuelle caténaire de 3 kV CC par une nouvelle installation fonctionnant à 25 kV CA, standard pour les lignes à grande vitesse européennes. Cette modernisation s'accompagne de l'installation du système européen de gestion du trafic ferroviaire ERTMS de Niveau 2, garantissant une interopérabilité totale avec les réseaux des autres pays européens.

Reprise des services entre Barcelone et Tarragone après les travaux à Roda de Berà

Le 3 mars dernier, les services ferroviaires conventionnels ont repris entre Barcelone et Tarragone, marquant l'achèvement réussi des travaux dans le tunnel de 422 mètres à Roda de Berà.

Un chantier crucial de cinq mois et 35 millions d'euros

Ce projet, d'une durée de cinq mois et d'un coût de 35 millions d'euros, visait à poser un troisième rail pour permettre la circulation des trains à écartement européen de 1435 mm entre Sant Vicenç de Calders et Tarragone, étendant ainsi la portée du Corridor Méditerranéen.

Des interventions techniques majeures dans le tunnel

Les travaux réalisés dans le tunnel de Roda de Berà ont été particulièrement complexes. Ils ont nécessité l'abaissement du plancher de 1,5 mètre pour pouvoir installer une nouvelle voie en dalle à double écartement. Le toit du tunnel a également fait l'objet de réparations importantes et a été rendu étanche pour garantir la durabilité de l'ouvrage.

Un nouveau système de drainage a été installé pour prévenir tout risque d'inondation, problématique récurrente dans les infrastructures souterraines. Parallèlement, les équipements de caténaire, de signalisation et de télécommunications ont été entièrement renouvelés pour répondre aux standards européens les plus récents.

Le Corridor Méditerranéen : un projet structurant pour l'Espagne et l'Europe

Ces avancées s'inscrivent dans la continuité des efforts déployés par l'Espagne pour développer son réseau ferroviaire à grande vitesse et améliorer les connexions avec le reste de l'Europe. D'autres réalisations récentes témoignent de cette dynamique, comme l'achèvement à 65% de la ligne à grande vitesse Murcia - Almeria en août 2024, ou l'inauguration de la nouvelle ligne entre Xátiva et La Encina en septembre 2023.

Un investissement massif pour transformer le réseau ferroviaire espagnol

Le programme du Corridor Méditerranéen représente un investissement colossal. En novembre 2022, l'Espagne annonçait déjà avoir consacré 4,4 milliards d'euros à ce projet d'envergure. Ces dépenses considérables illustrent l'importance stratégique accordée par Madrid à cette infrastructure ferroviaire, véritable colonne vertébrale du transport de passagers et de marchandises le long de la côte méditerranéenne espagnole.

Une vision européenne du transport ferroviaire

Le Corridor Méditerranéen espagnol s'inscrit dans une vision plus large de l'Union européenne visant à créer un réseau ferroviaire continental interconnecté et interopérable. L'adoption de l'écartement standard européen et des systèmes de signalisation ERTMS permettra une circulation fluide des trains entre l'Espagne et ses voisins européens, renforçant ainsi les échanges commerciaux et la mobilité des personnes à l'échelle du continent.

L'achèvement progressif de ce corridor contribuera également à la transition écologique en favorisant le transfert du transport de marchandises de la route vers le rail, mode de transport nettement moins polluant. Dans un contexte de lutte contre le changement climatique, cet aspect revêt une importance particulière et confirme la pertinence de ces investissements massifs dans les infrastructures ferroviaires.